Legs et donations 2022
- 48 - LE GUIDE DES ASSOCIATIONS & FONDATIONS 2022 ÉTUDE FAMILLE la personne concernée y a donné son consentement libre et éclairé » . L’ar- ticle 21 prévoit quant à lui que « le corps humain et ses parties ne doivent pas être, en tant que tels, source de profit ». D’autres trouvent leur source dans notre droit national. C’est le cas de l’ar- ticle R. 1235-2 du Code de la santé publique qui prévoit « l’importateur d’organes s’assure que ceux-ci ont été prélevés avec le consentement pré- alable du donneur et sans qu’aucun paiement, quelle qu’en soit la forme, n’ait été alloué à ce dernier. Il doit pouvoir justifier qu’il s’en est assuré ». 22 - Le recours à des règles matérielles pour s’assurer d’une volonté libre et éclairée est connue en droit international privé. On en retrouve en ma- tière d’adoption internationale. L’article 370-3 du Code civil prévoit en effet que « Quelle que soit la loi applicable, l’adoption requiert le consentement du représentant légal de l’enfant. Le consentement doit être libre, obte- nu sans aucune contrepartie ». La même exigence concernant le consen- tement libre s’impose au mariage présentant des éléments d’extranéité. Ainsi, l’article 202-1, alinéa 1 er , in fine du Code civil précise que « quelle que soit la loi personnelle applicable, le mariage requiert le consentement des époux, au sens de l’article 146 et du premier alinéa de l’article 180 ». C. - L’intervention de lois de police 23 - Une loi de police est une règle de droit interne jugée tellement fon- damentale pour l’État qui l’a édictée qu’elle va s’imposer dans un litige international quelle que soit par ailleurs la loi applicable. L’application de la loi de police a l’avantage d’éviter toute qualification des dernières volontés puisque la règle de conflit de lois, et donc la détermination d’une catégorie, n’ont plus leur place. Elle trouve une place privilégiée lorsque les dernières volontés concernent le sort du corps de son auteur après sa mort. 24 - Nous prendrons l’exemple des funérailles. Dans un arrêt en date du 19 septembre 2018, la Cour de cassation a dû résoudre la question de la loi applicable aux funérailles 14 . Une personne de nationalité marocaine domici- liée en France y décède. Sa concubine et ses deux enfants ont prévu l’inci- nération de sa dépouille. La mère et les frères et sœur du défunt s’opposent à la crémation pour des raisons religieuses. Ces derniers considèrent que la question relève de la catégorie de l’état et la capacité des personnes physiques régie par la loi nationale et donc la loi marocaine qui prohibe la crémation. La Cour de cassation considère que « la liberté d’organiser ses 14 Cass. 1 re civ., 19 sept. 2018, n° 18-20.693 : JurisData n° 2018-015914 ; Dr. famille 2018, comm. 281, note L. Carayon. – H. Péroz, La loi applicable aux funérailles : JCP G 2018, 1142. 15 En ce sens, JCl. Civil Code, Art. 16 à 16-14, fasc. 22, n° 4, Respect et protection du corps humain. – Éléments et produits du corps humain. – Organes, tissus, cellules, produits, par J.-R. Binet. 16 I. Labrusse-Riou, Bioéthique et droit international privé : objectifs et méthodes en question : Trav. com. fr. DIP 2000-2002, p. 56. 17 M. Josselin-Gall, Rép. internat. Dalloz, v° Bioéthique, 2011, n° 34 et s. 18 JCl. Civil Code, Art. 16 à 16-14, fasc. 20, n° 70, Respect et protection du corps humain – Éléments et produits du corps humain. – Cadre général de la réglementation, par R. Binet. 19 I. Labrusse-Riou, Bioéthique et droit international privé : objectifs et méthodes en question : Trav. com. fr. DIP 2000-2002, p. 57 et s. – M. Josselin-Gall, Rép. internat. Dalloz, v° Bioéthique, 2011, n° 35. funérailles ne relève pas de l’état des personnes mais des libertés indivi- duelles et que la loi du 15 novembre 1887, qui en garantit l’exercice, est une loi de police applicable aux funérailles de toute personne qui décède sur le territoire français » . Ainsi, la loi française s’impose en France dès lors que la personne y décède. 25 - Même en l’absence de jurisprudence, l’intervention de lois de police semble également inéluctable pour les dernières volontés en matière bioé- thique notamment concernant le don d’organe et don du corps, ceci pour plusieurs raisons. Tout d’abord, nous sommes confrontés à une réelle difficulté de qualifier les dernières volontés portant sur le corps humain 15 et donc d’y associer une règle de conflit de lois. Des auteurs n’hésitent pas à constater « une relative impuissance du droit international privé à prendre en charge les problèmes spécifiques de la bioéthique » 16 . Pour autant, certains proposent de créer une catégorie « statut personnel bioéthique » auquel s’applique- rait de façon combinée la loi nationale du sujet et de la loi du territoire où l’équipe médicale procède à une intervention relevant de la bioéthique 17 . Mais il faut constater que ni les textes, ni la jurisprudence n’ont retenu cette proposition. 26 - Ensuite, une autre difficulté tient au caractère mixte du droit de la bioé- thique entre le droit privé et le droit public 18 . Selon que la disposition tende vers l’une de ces branches, le conflit de lois n’a guère de place. Ainsi, beaucoup d’auteurs proposent que le don d’organe et de corps relève en France du statut de lois de police 19 , ce que semble confirmer la jurispru- dence sur les funérailles. REMARQUE Ainsi en France s’appliquerait la loi française à ces questions, quelles que soient la nationalité de l’auteur de la volonté ou sa résidence. 27 - Les dernières volontés mériteraient de bénéficier de solutions plus claires en droit international privé. À défaut de règlement européen ou de convention internationale applicables, il appartient au législateur français d’intégrer la dimension internationale applicable aux dernières volontés, ce qu’il n’a malheureusement pas envisagé. Reste un champ de réflexion passionnant mais qui n’est pas satisfaisant en pratique.
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