Legs et donations 2022

- 45 - LE GUIDE DES ASSOCIATIONS & FONDATIONS 2022 ÉTUDE FAMILLE 3 - Nous limiterons donc l’étude des dernières volontés en droit in- ternational privé aux règles appli- cables au fond du droit. Comment pouvons-nous les aborder sans faire un inventaire à la Prévert ? Nous proposons tout d’abord d’en- visager la question de la qualification des dernières volontés puis celle de la détermination du droit applicable aux dernières volontés. 1. La qualification des dernières volontés 4 - Le droit international privé s’applique lorsque la situation juridique pré- sente un ou plusieurs éléments d’extranéité, c’est-à-dire qu’elle met en cause plusieurs ordres juridiques. Il faut alors déterminer le droit applicable à la situation juridique puisqu’une loi étrangère peut trouver à s’appliquer en France. Pour se faire, il faut appliquer une règle de conflit de lois qui permette de déterminer la loi applicable. La règle de conflit de lois est constituée d’une catégorie à laquelle corres- pond un élément de rattachement qui permet de désigner la loi applicable. Pour déterminer la catégorie, il faut opérer une qualification. La qualification en droit international privé consiste, à partir de la question de droit posée (faits et prétention), à rechercher la catégorie la plus adé- quate. Concernant les dernières volontés, il faut noter une exclusion de principe de la qualification « actes juridiques ». Nous verrons que la qualification se fait en fonction de l’objet de la volonté, même si certaines qualifications restent incertaines. A. - L’exclusion de principe de la qualification « actes juridiques » 5 - Les dernières volontés impliquent une manifestation de volonté desti- née à produire un effet de droit. Elles devraient donc relever de la catégorie « actes juridiques ». Or, ces dernières sont classiquement exclues de cette catégorie. Le règlement européen n° 593/2008 sur la loi applicable aux obligations contractuelles 4 , dit Rome I, exclut de son champ d’application l’état et la capacité juridique des personnes physiques 5 et les successions 6 . Ainsi, les dernières volontés se rapportant à des questions de capacité ou de droit patrimonial de la famille sont exclues de la qualification « actes juridiques ». 6 - L’exclusion de la qualification des dernières volontés aux actes juri- diques a différentes raisons. Tout d’abord certaines volontés sont difficiles à qualifier comme celles por- tant sur le sort du corps après le décès de l’auteur de la volonté, ce que nous verrons plus loin. Si le règlement Rome I s’applique en principe aux donations, il est impossible de qualifier le don du corps ou d’organes d’obli- gations contractuelles. Ensuite, les actes juridiques sont soumis à la loi d’autonomie, c’est-à-dire par la loi choisie par son auteur. Aucune limite de choix n’est imposée. 4 PE et Cons. UE, règl. (CE) n° 593/2008, 17 juin 2008, sur la loi applicable aux obligations contractuelles (dit règlement Rome I) : JOUE n° L 177, 4 juill. 2008, p. 6. 5 PE et Cons. UE, règl. (CE) n° 593/2008, 17 juin 2008, art. 1-2-a, sur la loi applicable aux obligations contractuelles (dit règlement Rome I) : JOUE n° L 177, 4 juill. 2008, p. 6. 6 PE et Cons. UE, règl. (CE) n° 593/2008, 17 juin 2008, art. 1-2-c, sur la loi applicable aux obligations contractuelles (dit règlement Rome I) : JOUE n° L 177, 4 juill. 2008, p. 6. 7 JCl. Droit international, fasc. 10, n° 30, Successions internationales – Libéralités – Problèmes communs – Testaments, par G. Droz et M. Revillard. Le risque de fraude est trop im- portant, de pouvoir choisir sa loi concernant les dernières volontés. 7 - Pour autant, si la qualifica- tion d’actes juridiques n’est gé- néralement pas retenue pour les dernières volontés afin de ne pas les soumettre à la loi d’autonomie, cette dernière n’est pas entièrement exclue. C’est ainsi que le règlement n° 650/2012 donne une place à la professio juris . Le testament qui relève de la succession est soumis à la loi de la dernière résidence habituelle du défunt sauf si le défunt a choisi préalablement la loi applicable à sa succession. REMARQUE  La professio juris reste très limitée puisque seule la loi nationale peut être choisie. 8 - On retrouve également cette autonomie de la volonté dans le man- dat de protection future relevant en droit international privé du mandat d’inaptitude. Si ce dernier est en principe soumis à la loi de la résidence de son auteur, ce dernier peut choisir une autre loi. Ainsi, selon l’article 15 de la Convention de La Haye sur la protection internationale des adultes du 13 janvier 2000, l’auteur du mandat d’inaptitude peut choisir sa loi natio- nale ou la loi de l’État d’une résidence habituelle précédente ou encore la loi de l’État dans lequel sont situés ses biens. B. - Une qualification en fonction de l’objet de la volonté 9 - La qualification des dernières volontés en droit international privé ne se fait donc pas par rapport à la nature de l’acte mais en fonction de l’objet de la volonté. Nous prendrons l’exemple des testaments. Il n’existe pas en droit international privé de catégorie spécifique pour les libéralités. Alors à quelle catégorie appartient le testament ? Ce dernier est soumis à la qualification plus large des successions. En effet, le testament est pris en considération pour calculer la réserve selon la loi successo- rale et, éventuellement, pourra être réduite à la quotité disponible fixée par celle-ci 7 . Ainsi la succession testamentaire est régie par la loi applicable à la succession ab intestat. La règlement européen n° 650/2012 reprend en ce sens la solution de la jurisprudence, même si l’article 3-d du règlement ne définit pas le testament. Ce dernier est assimilé à une « disposition à cause de mort », incluant également le testament conjonctif ou le pacte successoral. 10 - Tout autre est la tutelle testamentaire. Les dernières volontés ont alors pour objet de désigner une personne qui prendra en charge l’enfant mi- neur si les parents venaient à disparaître. L’objet de la volonté est alors de désigner la personne qui aura la responsabilité parentale de l’enfant mineur. Cette volonté relève de la Convention de La Haye du 19 octobre 1996 en matière de responsabilité parentale et de mesures de protection La qualification des dernières volontés en droit international privé ne se fait donc pas par rapport à la nature de l’actemais en fonction de l’objet de la volonté

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