Legs et donations 2022

- 30 - LE GUIDE DES ASSOCIATIONS & FONDATIONS 2022 ÉTUDE FAMILLE et les conditions d’expression du consentement en exigeant qu’il soit « libre et éclairé » , « exprès » ou « recueilli par écrit » . Ils organisent également l’information de celui qui consent des atteintes, et rappellent systématique- ment que ce consentement est révocable à tout moment. 9 - Modalités du consentement en matière de don de corps. – Le consentement est également central dans la démarche du don de corps à la science, mais il ne repose pas sur les mêmes ressorts. En effet, il ne s’agit nullement ici de consentir à l’avance à des atteintes à l’intégrité du corps, puisque le corps donné à la science n’est pas appréhendé en tant que reste humain soumis à expérimentation. Bien loin des principes protecteurs du corps humain, le consentement au don de corps repose sur les exigences du droit funéraire ; il exprime un choix sur la destination du corps après la mort. Le principe de liberté des funérailles constitue en effet, aujourd’hui encore, le fondement premier du don de corps à la science. Ce principe de liberté est consacré par l’article 3 de la loi du 15 novembre 1887 sur la liberté des funérailles selon lequel « tout majeur ou mineur émancipé, en état de tester, peut régler les conditions de ses funérailles, notamment en ce qui concerne le caractère civil ou religieux à leur donner et le mode de sa sépulture » . Le don de corps apparaît alors comme une option funéraire, comme une alternative au choix du mode de sépulture. Les textes viennent préciser les modalités d’expression de ce consen- tement. La forme testamentaire doit être respectée. En la matière, l’ar- ticle R. 2213-13 du Code général des collectivités territoriales vise plus précisément la forme olographe en soulignant que l’intéressé « en a fait la déclaration écrite en entier, datée et signée de sa main » 8 . Ces conditions de forme permettent alors d’identifier le testateur et de confirmer sa volonté de tester. Et, là encore, le consentement est toujours révocable. Ainsi, le don de corps ne peut être réalisé qu’en exécution d’une volonté clairement exprimée par le donneur. B. – Don d’organes : l’expression d’un refus 10 - La présomption de consentement. – En matière de prélèvements d’organes post-mortem , la volonté de s’opposer supplante formellement la volonté de donner. En effet, la première doit être exprimée tandis que la seconde est présumée. Dès 1976, le législateur décida, au nom de la soli- darité collective, que les prélèvements post-mortem devaient être permis chaque fois que le défunt n’avait pas clairement énoncé, avant sa mort, son refus de tels prélèvements. Ce système dit du consentement présumé a ensuite été réaffirmé par les lois bioéthiques. Il a donné lieu à certaines dif- ficultés d’application en raison du rôle accordé aux proches de la personne décédée. Comment, en effet, connaître la volonté du défunt et son éven- tuelle opposition ? Ou, pour dire les choses plus techniquement, comment administrer la preuve du refus du défunt ? Jusqu’en 2016, le Code de la santé publique prévoyait que ce refus pouvait être « exprimé par tout moyen, notamment par l’inscription sur un registre automatisé prévu à cet effet » (CSP, art. L. 1232-1 ancien) . Et lorsque le 8 Sur ce point, V. aussi le nouvel article L. 1261-1 du Code de la santé publique : « Le consentement du donneur est exprimé par écrit ». 9 Sur ce point, V. Comité consultatif national d’éthique pour les sciences de la vie et de la santé (CCNE), Questions d’éthique relatives au prélèvement et au don d’organes à des fins de transplantation, 7 avr. 2011, avis n° 115, p. 4. 10 Comité consultatif national d’éthique pour les sciences de la vie et de la santé (CCNE), Questions d’éthique relatives au prélèvement et au don d’organes à des fins de transplantation, 7 avr. 2011, avis n° 115, p. 5. 11 En vertu de l’article L. 1232-2 du Code de la santé publique, ce système de consentement présumé est néanmoins écarté pour les mineurs. médecin n’avait pas directement connaissance de la volonté du défunt, il devait « s’efforcer de recueillir auprès des proches l’opposition au don d’organe éventuellement exprimée de son vivant par le défunt, par tous moyens » (CSP, art. L. 1232-1, al. 3 ancien) . Les proches apparaissaient en effet comme les mieux placés pour connaître l’opinion de la personne décédée sur la question. Le risque restait néanmoins celui d’un glissement subreptice de la volonté du défunt à la volonté des proches. Et, en pratique, les équipes médicales tendaient souvent à se fonder sur l’avis des familles, en dépit du caractère non contraignant de celui-ci 9 . Cette « distorsion entre la loi et la pratique » 10 se comprend facilement eu égard au moment où les proches sont sollicités : frappés par le deuil, ils doivent prendre une décision difficile dans des délais extrêmement courts, ce qui rend délicate l’intervention des équipes médicales. Face à la pénurie d’organes et au nombre de personnes en attente d’une greffe, le législateur a donc souhaité redonner sa pleine vigueur à la pré- somption de consentement. En 2016, la loi de modernisation de notre sys- tème de santé est ainsi venue préciser les modalités du refus et le rôle des proches, sans pour autant révolutionner le système en vigueur. 11 - Modalités d’expression du refus. – Sur le plan des modalités du refus, l’article 1232-1 du Code de la santé publique dispose désormais qu’il s’effectue « principalement par l’inscription sur un registre national automatisé prévu à cet effet » 11 . Le décret du 11 août 2016 vient néanmoins prévoir des modes subsidiaires d’expression du refus. Une personne peut ainsi exprimer son refus par écrit et confier ce document à un proche. Si elle est dans l’impossibilité d’écrire et de signer ce document par elle-même, elle peut demander à deux témoins d’attester que le document qu’elle n’a pas pu rédiger elle-même est l’expression de sa volonté libre et éclairée. Enfin, un proche de la personne décédée peut faire valoir le refus que cette personne a manifesté expressément de son vivant. Le proche ou l’équipe de coordination hospitalière devra alors transcrire ce refus par écrit, en indiquant précisément le contexte et les circonstances de son expression. REMARQUE  Avec ces nouvelles règles, la présomption de consentement devient donc une présomption mixte : elle ne peut être renversée que par les moyens prévus par la loi. 2. Le respect de la volonté quant au devenir du corps et des organes 12 - Les proches jouent un rôle essentiel pour assurer le respect du prin- cipe et des modalités du don. Les finalités du don doivent également être respectées par les médecins et les établissements bénéficiaires. À cet égard, certaines dérives de la pratique ont révélé l’encadrement lacunaire du don de corps et ont justifié l’intervention du législateur.

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