Legs et donations 2022

- 22 - LE GUIDE DES ASSOCIATIONS & FONDATIONS 2022 ÉTUDE FAMILLE de cultes dédiés) et les divers actes liés à cette cérémonie. Ces dernières volontés sont souvent qualifiées d’extrapatrimoniales 3 , parce qu’elles sont le prolongement de la volonté individuelle d’une personne. Dès lors, elle ne concerne pas le sort de la concession funéraire, qu’elle soit acquise par le vivant ou par sa famille. En effet, cet acte est créateur d’une situa- tion patrimoniale, puisqu’il donne aux ayants droit du défunt une série de prérogatives, du droit à l’inhumation à la possibilité de faire inhumer leurs propres descendants. 3 - La loi du 15 novembre 1887 sur la liberté des funérailles est le texte de référence concernant les dernières volontés. Cette liberté a pour corollaire une souplesse dans sa mise en œuvre, aucun formalisme n’étant imposé à qui souhaite appréhender sa mort. En outre, cette liberté est assortie d’un principe de respect de la volonté du défunt qui s’adresse tant aux familles qu’à la commune et aux opérateurs funéraires. C’est alors l’empreinte de la personnalité juridique du défunt qui ressurgit. Mais cette liberté n’est pas absolue, puisque le défunt est aussi considéré par le droit objectif comme un cadavre, c’est-à-dire l’objet d’un respect et non un sujet de droit. Or, l’article 16-1-1 du Code civil entend le protéger par le principe de dignité et de respect dû aux morts. 4 - Ce rappel plane sur le futur défunt lui-même, qui n’aura pas la possibi- lité de choisir pour ses funérailles des modes de sépultures non reconnus par la loi 4 , mais également sur sa famille, vue par le droit funéraire avec confiance et défiance : garante du respect de la volonté du défunt, elle est aussi susceptible de porter atteinte au respect dû au cadavre, comme en attestent les actions en exhumation intentées par certains membres de la famille. 5 - En établissant des principes aux intitulés baroques, tels que « la tran- quillité du défunt » 5 ou « le repos des morts » 6 , la jurisprudence accueille ces conflits avec la plus grande prudence. En effet, entre le défunt et la famille, coexistent une série d’intermédiaires qui sont susceptibles d’inter- férer dans l’organisation des funérailles telle que voulue par le défunt. La police des funérailles et des cimetières veille au respect de la volonté du dé- funt, mais également de l’ordre public. Plusieurs interventions en attestent : ainsi, la mairie refusant l’inhumation dans le cimetière communal au nom des conditions légales (CGCT, art. L. 2223-3) ; le préfet en cas d’inhumation sur un terrain privé pour encadrer ce mode réglementé (CGCT, art. L. 2223- 9) ; le médecin lors d’une crémation, pour l’autoriser au niveau médico-lé- gal (CGCT, art. L. R. 2213-34) ; l’agent communal, qui peut être présent lors de la dispersion des cendres qui est interdite sur la voie publique (CGCT, art. L. 2223-18-1) …Acte de volonté du vivant de son auteur, l’organisation des funérailles ressemble après sa mort à une danse macabre qui met en scène plusieurs acteurs des droits administratif, civil et pénal. 3 M. Dieng, Les dernières volontés d’ordre extrapatrimonial : RLDC 1er mars 2007, n° 36. 4 V. ainsi, pour l’interdiction de la cryogénisation : CE, 5 e et 4 e ss-sect., 6 janv. 2006, n° 260307, Martinot : JurisData n° 2006-069429 ; JCP G 2006, II, 10059, note L. Erstein ; Dr. adm. 2006, comm. 64, note L. Erstein ; D. 2006, p. 1875, note I. Corpart. 5 CA Lyon, 1 re ch. civ., sect. B, 3 févr. 2015, n° 13/08724. 6 CA Amiens, 1 re ch., 1 re sect., 21 sept. 2006, n° 05/03969. 7 L. 15 nov. 1887 sur la liberté des funérailles, art. 3. 8 C. civ., art. 458, al. 2 : « sont réputés strictement personnels la déclaration de naissance d’un enfant, sa reconnaissance, les actes de l’autorité parentale relatifs à la personne d’un enfant, la déclaration du choix ou du changement du nom d’un enfant et le consentement donné à sa propre adoption ou à celle de son enfant ». 6 - Deux types de schémas peuvent concerner les funérailles. Lorsque le défunt a prévu ses dernières volontés avant de mourir, les funérailles seront organisées conformément à sa volonté. Lorsqu’il décède sans avoir rien prévu, ou lorsqu’un conflit naît quant à l’interprétation exacte à donner à sa volonté, inconnue ou présumée, le juge saisi d’un litige devra remonter le temps pour se situer du vivant du défunt. Les funérailles sont donc ou bien appréhendées par les dernières volontés, ou bien organisées en l’absence de dernières volontés. 1. Les funérailles appréhendées par les dernières volontés 7 - La prévision des funérailles par le futur défunt est encouragée par la loi, qui tend à assurer le respect de ses dernières volontés. La liberté dont il dispose lui offre plusieurs supports pour fixer ses dernières volontés, ce qui pose parfois certains problèmes. A. - Le respect des dernières volontés 8 - À celui appréhendant sa mort pour organiser les modalités de ses fu- tures funérailles, la loi du 15 novembre 1887 offre une liberté qui se veut absolue pourvu qu’il soit « majeur ou mineur émancipé » et « en état de tes- ter » 7 . Qu’il s’agisse donc d’un testament, olographe ou non, d’un contrat, ou de tout acte juridique, l’article 414-1du Code civil trouve à s’appliquer. 9 - La situation de l’auteur majeur sous protection est plus épineuse, no- tamment en raison de l’évolution du droit des majeurs protégés vers plus d’autonomie personnelle. Pour le majeur sous tutelle souhaitant déterminer ses dernières volontés dans un testament, l’article 476, alinéa 2, du Code civil s’applique : le ma- jeur doit être en état de tester, et l’autorisation du juge des tutelles ou du conseil de famille sera nécessaire à peine de nullité du testament. Mais qu’en est-il du majeur sous tutelle qui utilise un autre support pour ses der- nières volontés ? De façon générale, les dernières volontés ne devraient-elles pas relever de la catégorie d’acte strictement personnel, pour laquelle aucune assistance ou représentation n’est possible selon l’article 458 du Code civil ? Cet article en propose une liste indicative 8 , mais il paraît possible d’y inté- grer l’organisation de ses propres funérailles. L’organisation des funérailles concerne assurément le devenir de la personne elle-même. La loi de 1887 est l’expression d’un pouvoir de volonté du futur défunt ; non pas un pouvoir de disposition qui concernerait le propriétaire de ses biens, mais plutôt un pouvoir de volonté individuelle ; en déterminant ses dernières volontés, la personne se détermine elle-même et se réalise comme individu par-delà la mort.

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