Legs et donations 2022

- 18 - LE GUIDE DES ASSOCIATIONS & FONDATIONS 2022 ÉTUDE FAMILLE 1. L’expression actuelle des dernières volontés 8 - Le malade peut demander l’arrêt des traitements curatifs et, ainsi, se laisser mourir. Ses demandes peuvent porter sur les soins palliatifs et la prise en charge de ses souffrances. A. - Se laisser mourir 9 - Respect du refus de traitement. – Rappelons au préalable que, dans le Code de la santé publique, l’arrêt des traitements peut intervenir dans deux cas, soit à la demande du malade, soit, uniquement lorsque ce dernier est hors d’état d’exprimer sa volonté, à l’initiative du médecin à la suite d’une procédure collégiale (CSP, art. L. 1110-5-1, al. 1 er ) . Il s’agit là, pour le médecin, d’une permission légale de laisser mourir le malade. Lorsque la demande émane de ce dernier, le refus des traitements doit être respecté y compris lorsque ce choix doit conduire au décès. Il en va ainsi, que les trai- tements présentent encore une utilité ou non. Si les traitements sont deve- nus inutiles, parce que la maladie est incurable (cancer en phase terminale, maladie dégénérative d’origine génétique), le médecin est, dans tous les cas, tenu de ne pas les entreprendre, sans quoi il risquerait de tomber dans l’obstination déraisonnable, ce qui serait une faute. S’ils peuvent encore présenter une utilité, parce que des chances de guérison demeurent, le médecin doit tout de même respecter le refus du patient. La loi Kouchner a en effet prévu que « Si, par sa volonté de refuser ou d’interrompre tout traitement, la personne met sa vie en danger, elle doit réitérer sa décision dans un délai raisonnable » . Dans ce cas, « Le médecin sauvegarde la dignité du mourant et assure la qualité de sa fin de vie en dispensant les soins palliatifs » (CSP, art. L. 1111-4, al. 3). L’exigence d’une décision réitérée vise à éviter un refus de soins irréfléchi ou exprimé dans l’urgence. 10 - Cas particulier du mineur. – La question de la portée de la volonté exprimée par un mineur souhaitant interrompre les traitements est parti- culièrement délicate. Le Code de la santé publique n’apporte sur ce point presque aucune précision, si ce n’est le fait que lorsqu’un arrêt des trai- tements est envisagé, le médecin recueille seulement « l’avis » 7 (et non l’autorisation) des titulaires de l’autorité parentale. Le médecin est-il pour autant tenu de respecter la demande d’arrêt des traitements du mineur, comme il doit le faire pour un majeur ? Cette obligation devrait être fonction du degré de maturité de l’intéressé, par référence aux textes généraux à la fois du Code civil et du Code de la santé publique ( C. civ., art. 371-1, al. 4. – CSP, art. L. 1111-2) . Certains mineurs atteints de cancers résistants mani- festent un épuisement qui les conduit à refuser une énième chimiothérapie, alors même que les parents veulent au contraire tout tenter pour sauver leur enfant. D’un point de vue éthique, il peut sembler délicat d’imposer la poursuite des traitements au mineur dans un tel contexte. La fatigue et les souffrances liées aux effets indésirables du traitement peuvent, par ailleurs, conduire le médecin à considérer qu’il est déraisonnable de s’obstiner. 7 CSP, art. R. 4127-37-2. – CE, ord. réf., 5 janv. 2018, n° 416689 : JurisData n° 2018-000023 ; Dr. famille 2018, comm. 142, note I. Maria ; JCP G 2018, 217, note Fr. Vialla ; JCP A 2018, 2051, note C. Castaing. 8 L. n° 99-477, 9 juin 1999, visant à garantir le droit d’accès aux soins palliatifs : JO 10 juin 1999. 9 CCNE, avis n° 121, Fin de vie, autonomie de la personne, volonté de mourir, juin 2013, p. 37-38. 10 G. Mémeteau, Le cas Bonnemaison : Médecine & Droit, 2015, n° 131, p. 30. B. - Éviter de souffrir 11 - La prise en charge des souffrances. – « Le laisser mourir, ce n’est pas le laisser crever » . La formule de Jean Léonetti permet d’observer que l’arrêt des soins n’est pas synonyme d’un abandon du malade. La qualité de la fin de vie de la personne dépend en grande partie de la manière dont est prise en charge la douleur du patient. La loi du 9 juin 1999 8 avait déjà consacré le « droit d’accéder à des soins palliatifs et à un accompagnement » . La loi du 4 mars 2002 a expressément introduit dans le Code de la santé publique l’obligation de prendre en charge la douleur (CSP, art. L. 1110-5, al. 2), tout en donnant une définition légale des soins palliatifs. Ce sont « des soins actifs et continus pratiqués par une équipe interdisciplinaire en institution ou à domicile. Ils visent à soulager la douleur, à apaiser la souffrance psychique, à sauvegarder la dignité de la personne malade et à soutenir son entourage » (CSP, art. L. 1110-10). 12 - Or, le malade qui souhaite l’arrêt des traitements curatifs peut, dans le même temps, formuler certaines demandes de soins palliatifs. Il peut demander que les doses de morphine soient augmentées, au risque de précipiter le décès, ce que l’on désigne habituellement sous le terme de « double effet ». Surtout, le malade peut demander à bénéficier d’une séda- tion profonde et continue (SPC), demandes auxquelles sont régulièrement confrontés les professionnels des services de soins palliatifs. L’introduction d’un cadre légal de la SPC est l’une des évolutions majeures de la loi du 2 février 2016. Le CCNE rappelle que « le terme de sédation désigne l’uti- lisation d’un traitement visant à atténuer la perception d’un symptôme ou d’une souffrance réfractaire ou encore à provoquer une altération de la vigilance ou de la conscience jusqu’au décès chez une personne atteinte d’une affection grave et incurable. Les doses utilisées sont titrées et adap- tées à l’intention. Si la sédation est continue, la mort survient effectivement, mais dans une temporalité qui ne peut pas être prévue et dans un contexte de relatif apaisement qui peut favoriser l’accompagnement par les proches […] » 9 . L’utilisation d’hypnotiques sédatifs n’était certes pas inconnue de la pratique hospitalière, mais elle n’était régie que par des recommandations de bonnes pratiques de la Haute Autorité de santé ou de la Société fran- çaise d’accompagnement en soins palliatifs. Cette technique ne vise pas à provoquer la mort du patient, mais à le plonger dans un sommeil profond altérant sa conscience jusqu’à son décès, lorsque les traitements s’avèrent inefficaces pour soulager les souffrances. Elle n’est donc pas assimilable à une forme d’euthanasie, même si des dérives sont possibles, comme l’a illustré le cas Bonnemaison 10 . 13 - La demande de sédation. – Le cadre général de la SPC est fixé à l’article L. 1110-5-2 du Code de la santé publique, qui permet d’y recourir dans trois cas. Les deux premiers nous intéressent, car ils concernent la demande de la personne, souhaitant « éviter toute souffrance » et « ne pas subir d’obstination déraisonnable » . Dans ce cas, « une sédation profonde et continue provoquant une altération de la conscience maintenue jusqu’au décès, associée à une analgésie et à l’arrêt de l’ensemble des traitements

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