Legs et donations 2022

- 14 - LE GUIDE DES ASSOCIATIONS & FONDATIONS 2022 ÉTUDE FAMILLE B. - Une anticipation de l’expression de volonté juridiquement sécurisée 11 - La personne exprime donc par anticipation une volonté pour une si- tuation qu’elle n’a pas encore vécue, mais pour laquelle elle subodore une difficulté ou l’impossibilité d’exprimer ses choix. D’ailleurs, il n’est pas in- concevable que la personne fasse une analyse nouvelle au moment où la situation prend réalité. Elle pourra ainsi se retrouver dans un moment as- sez éloigné par rapport à l’acte d’anticipation ou par rapport à la personne choisie pour porter sa volonté. Le cadre juridique posé permet de sécuriser l’expression de volonté de la personne. 12 - D’une part, le but premier est de protéger le plus longtemps possible l’expression de volonté d’une personne. Qu’il y ait directives anticipées, personne de confiance ou mesure de protection de quelque nature que ce soit, l’interlocuteur de la personne recherchera toujours l’expression de sa volonté permettant de voir ainsi la concordance entre ce qui a pu être écrit dans un acte ou dit encore à une personne de confiance. Ainsi, au moment de l’acte de soin ou encore la formation d’un engagement pa- trimonial, l’expression de volonté sera toujours recherchée, parce que la personne pourra évaluer sa situation à l’instant T, ce qui n’aura pas été nécessairement le cas au moment de la rédaction des directives anticipées ou de la détermination de ses souhaits précisés dans le mandat de protec- tion future. La personne pourra ainsi analyser sa situation en fonction de ce nouveau contexte. Elle le fera avec ses capacités restantes et uniquement en cas d’impossibilité, le porteur de sa volonté (l’acte écrit ou la personne désignée) interviendra. 13 - Dans cette logique, l’ordonnance n° 2020-232 du 11 mars 2020 12 souhaitant articuler le mieux possible les décisions relevant de plusieurs corps de textes insiste sur cette recherche constante de volonté. Elle a ainsi réécrit certains textes du Code de la santé publique et du Code de l’action sociale et des familles, soulignant bien cette progression : d’abord, l’expression de volonté de la personne, puis éventuellement l’intervention du tiers. Ce tiers peut être celui qui a recueilli la parole confiée en tant que témoin, ou encore qui assiste la personne protégée même pour des mesures de représentation ; l’organe de protection, mandataire, tuteur ou personne habilitée intervenant exceptionnellement seul. 14 - D’autre part, permettant d’accroître cette sécurité, la personne reste maître de cette anticipation. La protection de la volonté et, donc, de la confiance donnée à un tiers pour la porter est éminemment personnelle. Sur ce mécanisme utilisé pour anticiper cette expression de volonté laquelle sera donc lue, analysée, transmise par un acte et/ou par un tiers, la personne concernée garde tout pouvoir. Juridiquement, tout acte anticipé peut être révoqué. Cette structuration des dernières volontés pour que la personne puisse s’exprimer est ainsi sécurisée par la recherche de l’expression contem- poraine de l’événement, quand bien même la personne a prévu cet outil d’anticipation et par cette révocation à tout moment. 12 Ord. n° 2020-232, 11 mars 2020, relative au régime des décisions prises en matière de santé, de prise en charge ou d’accompagnement social ou médico-social à l’égard des personnes majeures faisant l’objet d’une mesure de protection juridique : JO 12 mars 2020, texte n° 3. – V. S. Moisdon-Chataigner, Quelles avancées juridiques pour les décisions médicales et sociales des personnes vulnérables ? Analyse de l’Ordonnance n° 2020-232 du 11 mars 2020 : RJPF 2020 5/2, p. 11-15. 13 R. Aubry, La loi n° 2016-87 du 2 février 2016 créant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie : Journal de médecine légale, droit médical, 2017, n° 60, p. 15-18. REMARQUE  Lorsque cette anticipation s’extériorise, la protection de la volonté est toujours dans l’intérêt de la personne. 2. Confier sa volonté : une anticipation respectée dans l’intérêt de la personne 15 - Alors même que l’acte en lui-même connaît un cadre sécurisé, il convient aussi d’assurer et de s’assurer de la confiance donnée à celui qui va lire, analyser, interpréter les dernières volontés. Cela a d’autant plus d’importance à ce moment de la fin de la vie alors que l’expression de volonté directe sera devenue parcellaire ou impossible. Il est nécessaire que cette anticipation, et ce qu’elle dit de la personne, soient connus. Si le cadre juridique posé permet à l’auteur de l’anticipation de moduler à tout moment ses souhaits, il faut donc déterminer quelles sont vraiment ces dernières volontés, les plus récentes, cohérentes et conformes à ce qu’il est et souhaite. Ceci soulève la question de la traçabilité des actes rédigés ou paroles confiées. Au-delà, la protection de la personne doit aussi être assurée. Le rôle du juge devient ici essentiel pour protéger cette expression de la volonté dans l’intérêt de la personne vulnérable. A. - La traçabilité de l’anticipation de la volonté 16 - Lorsqu’il s’agit de directives anticipées, la traçabilité est assurée et le Code de la santé publique prévoit la conservation et les modalités de consultation des directives anticipées. Cette procédure rodée du droit de la santé permet de protéger les droits de la personne par les obligations professionnelles et déontologiques des soignants. Il sera même possible de s’écarter des directives par le pouvoir d’interprétation des professionnels de santé 13 . 17 - Pour la personne de confiance, la nomination est souple, ce qui est un atout pour la favoriser. Pour autant, il y a souvent peu d’éléments pour connaître la véracité des propos retranscrits par la personne de confiance si elle intervient tardivement. CONSEIL PRATIQUE  Il est conseillé une désignation la plus précoce possible pour que la personne de confiance accompagne la personne vulnérable afin de se faire connaître des professionnels médico-sociaux, d’avoir l’historique des échanges pour pouvoir s’entretenir avec la personne concernée ou relayer au mieux sa parole. Tout repose ici sur ce crédit donné à la personne de confiance même si cela ne lui confère pas un pouvoir juridique, car elle n’assiste ni ne représente la personne. Pourtant, dans les faits, son témoignage a une place importante. Là encore, si un mandat de protection future est envisageable, les précisions ins- crites dans le mandat pourront être des moyens probatoires efficaces.

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