Legs et donations 2022

- 12 - LE GUIDE DES ASSOCIATIONS & FONDATIONS 2022 ÉTUDE FAMILLE 2 - Mais cette période peut être marquée par un affaiblissement de la per- sonne au point de rendre difficile ou impossible l’expression de volonté. Il n’en demeure pas moins que la personne garde par principe une capacité juridique, peut et doit encore exprimer cette volonté et donner son consen- tement 4 . Il peut donc être compliqué de faire les derniers actes dont la fina- lité sera éventuellement d’organiser ces dernières volontés personnelles et patrimoniales. La personne peut avoir conscience de cette nouvelle fragilité qui peut conduire jusqu’à une altération de ses facultés et savoir qu’à un moment donné elle ne pourra plus elle-même s’exprimer. Ainsi anticiper pour, voire pendant, cette période de la fin de la vie 5 peut s’avérer utile et nécessaire, permettant que sa propre volonté soit portée jusqu’au seuil de la mort. 3 - Quels sont alors les meilleurs outils juridiques pour préserver cette expression de volonté ? Certes, au moment de la rédaction ou la réalisa- tion de tout acte, il convient de s’adresser à la personne elle-même. Mais en postulant une future impossibilité de s’exprimer, l’anticipation sera un atout car ce sera une possibilité pour la personne de s’exprimer, même de manière décalée dans le temps ou portée par un tiers. Agir de manière précoce sera ainsi essentiel, car lorsque l’altération s’installe, l’anticipation n’est pas impossible 6 mais devient pratiquement plus difficile à réaliser et déstabilisante pour la personne concernée et ses proches. 4 - Plusieurs mécanismes permettent ainsi d’anticiper l’expression de vo- lonté, les directives anticipées, la désignation d’une personne de confiance ou encore l’organisation de sa protection juridique. Ce sont divers atouts (dont il ne faut pas non plus ignorer les faiblesses) pour préserver l’ex- pression de volonté le plus longtemps et de la manière la plus sécurisée possible. Il faut que le cadre juridique assure force et confiance pour ces mécanismes d’anticipation. Nous pouvons constater combien l’anticipation de l’expression de la volonté est encouragée. Mais confier cette volonté en- gage. Lorsque cette anticipation est effectuée, elle doit pouvoir être suivie, respectée, toujours dans l’intérêt de la personne. 1. Exprimer sa volonté : une anticipation encouragée 5 - Le législateur a prévu qu’une personne pense ce moment où la conscience lui échappera et qu’elle ne pourra plus exprimer ses choix et souhaits ou pourvoir à ses intérêts. Il est alors des mécanismes juridiques qui permettent cette expression de la volonté au-delà de la conscience. Chaque mécanisme a sa propre finalité plus ou moins ciblée jusqu’à être 4 V. les capacités présentes et réelles des personnes même à des degrés divers, B. Eyraud, Les répercussions de la maladie sur les conditions capacitaires : quand le désir de liberté s’impose aux proches, in C. Le Galès, M. Bungener et le groupe Capabilités (dir.), Alzheimer : préserver ce qui importe – Les « capabilités » dans l’accompagnement à domicile : PUR, coll. Le sens social, 2015, p. 279-298. – A. Sen, The idea of justice, Londres Allen Lane, 2009 et traduction française : L’idée de justice : Paris, Flammarion, 2010. – B. Eyraud, J. Minoc, C. Hanon, Choisir et agir pour autrui ? Controverse autour de la convention de l’ONU relative aux droits des personnes handicapées : Doin, coll. Polémiques, 2018. – E. Pecqueur, A. Caron-Déglise, Th. Verheyde, Capacité juridique et protection juridique à la lumière de la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées : D. 2016, chron., p. 958 et s. 5 Les démarches proposées pourront aussi concerner une période bien différente dans le cadre, par exemple, de la survenance d’un handicap. Compte tenu de la thématique retenue autour des dernières volontés, nous aborderons cette perception de l’anticipation pour préparer à la fois la période de fin de la vie et de la mort. 6 V. la possibilité d’un mandat de protection future pour les personnes bénéficiant d’une mesure de protection (sauvegarde, curatelle, habilitation familiale spéciale ou habilitation familiale assistance). 7 G. Raoul-Cormeil, Les personnes protégées et les dispositifs d’anticipation sur la fin de vie médicalisée : Dr. famille 2016, dossier 35. 8 H. Fulchiron (dir.), L’accompagnement des personnes majeurs vulnérables, entre nécessité juridique et exigence éthique : Dr. famille 2017, dossier 17. 9 V. l’introduction de la personne de confiance au cœur du Code de l’action sociale et des familles pour accompagner les personnes dans la mise en œuvre des dispositifs sociaux par la loi n° 2015-1776 du 28 décembre 2015 relative à l’adaptation de la société au vieillissement et le décret n° 2016-1395 du 18 octobre 2016 déterminant l’information sur le droit de désigner la personne de confiance mentionnée à l’article L. 311-5-1 du Code de l’action sociale et des familles, V. B. Bévière-Boyer, Éthique et droit du vivant : RGDM, 2017, n° 62, p. 167-198. 10 Préférence reconfirmée par la loi du 23 mars 2019 ; V. N. Péterka, La déjudiciarisation du droit des personnes protégées par la loi du 23 mars 2019, progrès ou recul de la protection ? : JCP G 2019, doctr. 437. plus globale. La diversité des mécanismes est séduisante pour promouvoir l’expression de cette volonté. Une telle promotion suppose un encadrement juridique précis et sécurisant. A. - La diversité des anticipations 6 - Les directives anticipées (CSP, art. L. 1111-11) interviennent dans le contexte spécifique du soin. Elles ont été déterminées pour permettre l’expression de la volonté de la personne qui est la pierre angulaire de l’acte médical. Elles répondent à un cadre spécifique pour faire connaître les choix de la personne alors même qu’elle ne pourra plus les exprimer 7 . Il se peut aussi qu’une personne souhaite envisager une continuité dans le soutien dont elle a besoin : la personne de confiance sera alors un accom- pagnant 8 le temps d’une hospitalisation, d’un rendez-vous administratif ou sur un plus long terme. La désignation d’une personne de confiance concerne autant le soin (CSP, art. L. 1111-6) que les dispositifs sociaux (CASF, art. L. 311-5-1) 9 . L’entrée dans une institution, le choix d’un nouveau lieu de vie supposent souvent des démarches compliquées. Ce sera donc l’occasion de préparer cette nouvelle étape grâce à cette anticipation en parlant de ses choix et de ses volontés à une personne que l’on suppose proche. La personne de confiance est ainsi considérée comme le témoin privilégié de la personne. 7 - L’anticipation de l’expression de volonté peut prendre un tour plus gé- néral et global lorsque la personne anticipe l’altération de ses facultés. Le mandat de protection future est ainsi l’outil idéal pour anticiper cette expression de volonté car le mandant peut notifier tout ce qu’il souhaite (C. civ., art. 477) . Le mandant peut ainsi prévoir le périmètre et les modalités d’intervention du mandataire. Le mandat de protection future mis en œuvre peut s’articuler avec d’autres mécanismes. Ainsi, il faut s’interroger sur le maintien ou l’éventuelle révocation des autres mandats, y compris notariés. L’envergure du mandat de protection future concerne aussi la protection de la personne et permet de réfléchir à la désignation au maintien ou pas de la personne de confiance. 8 - Il faut préciser la logique particulière dans laquelle s’inscrit le mandat de protection future. Quand bien même il est la mesure préférée et plébiscitée par le législateur parmi toutes les mesures de protection 10 , il doit répondre aux mêmes principes directeurs que les autres, car le pouvoir conféré au mandataire est d’importance. Notamment, le mandat de protection future ne sera mis en œuvre que pour une altération franche des facultés de la personne l’empêchant de pourvoir à ses intérêts. Lorsque cette altération

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