la revue fiscale du patrimoine

10 ASSURANCE-VIE La question anxiogène du risque est au cœur des préoccupations sociales et économiques : risque climatique pour notre planète, risque démographique pour les retraites, risque de variation négative des unités de compte, risque des assureurs vie lié aux fonds euros et aux taux bas... Le risque conjugué avec une telle prégnance appelle d’évidence une réponse appropriée de ceux dont c’est le métier de le gérer : les assureurs. Ce constat nous donne l’occasion de s’interroger sur l’orientation que devrait prendre l’assurance-vie dans les années à venir ; la nouvelle équation patri- moniale est-elle : taux bas égal hauts risques ? Lorsque Laurent Gayet proposa la rédaction de cet article à Me Olivier Rou- mélian, il savait que ce dernier était, comme lui, un coureur de fonds. Dès lors, il lui proposa de passer à l’action qui sied au contexte car pour le succès, non garanti d’ailleurs, c’est aujourd’hui l’unité qui compte. Fonds verts, fin du fonds euro et de sa garantie en capital, nouveau produit retraite, l’actualité ne manquait pas en effet pour une idée nouvelle qui finalement parle de l’ancien : l’indémodable contrat d’assurance-vie (CAV) car le CAV se rebiffe... toujours ! Ces propos liminaires introductifs illustrent un nouveau courant d’ère dis- ruptif pour espérer, un jour, obtenir un nouvel air durablement respirable. Les planètes sont-elles désormais alignées entre assureurs, régulateurs et souscripteurs ? Même si cela ressort de la convenance, il n’est pas inutile de rappeler que l’assurance-vie reste le placement préféré des Français, chaque année consacrant ce classement sans surprise. L’année 2019 n’a pas démenti, et au contraire, a confirmé cette assertion. Selon les chiffres publiés par la Fédération française des assurances (FFA), tous les indicateurs sont au vert avant même tout investissement proposé ou imposé par la loi dans des unités de compte écologiques. La collecte nette en assurance-vie et capitalisation s’établirait à la somme conséquente de 26 milliards d’euros. Autre indicateur significatif de cette année 2019, les cotisations en unités de compte s’élèveraient à près de 40 milliards d’euros, soit un peu plus de 27 % du montant total. Quels enseignements en tirer ? En premier lieu, prise comme une entité globale, l’assurance-vie est peu ré- ceptive aux facteurs exogènes pouvant réduire son attractivité. Qu’il s’agisse de l’augmentation des prélèvements sociaux portés à 17,2 % ou de l’adoption d’un second taux de taxation du prélèvement sui generis au décès de l’assuré fixé à 31,25 %, la fiscalité n’a eu de cesse d’augmenter ou d’être modifiée pour la partie revenus par l’entrée en vigueur de la flat tax. De même, l’assurance-vie résiste aux contraintes réglementaires qui imposent toujours plus de procédures, de communication au profit des prospects et des clients et de transparence au niveau des frais. Les assureurs adaptent et les épargnants adoptent. Enfin, même sur les dispositifs anti-abus, l’ordonnance n° 2019-1068 du 21 oc- tobre 2019 relative à l’échange automatique et obligatoire d’informations dans le domaine fiscal en rapport avec les dispositifs transfrontières devant faire l’objet d’une déclaration, prise en transposition de la directive (UE) 2018/822 du Conseil du 25 mai 2018 dite « DAC 6 » ( V. N. Jacquot, O. Janoray, M. Mazzuco, DAC6 : à vos marqueurs, prêts, partez ! : RFP 2020, étude 3 ) ne devrait pas avoir vocation, sauf exception, à s’appliquer à l’assurance-vie, ce qui évitera une contrainte supplémentaire à tous les intermédiaires concernés. En second lieu, l’assurance-vie résiste également jusqu’à présent à l’endémie du rendement du fonds euro ; cette pierre angulaire qui a pourtant fondé son succès durant des décennies. Même si l’épargnant s’appauvrit, le fait de dispo- ser d’un produit dont le capital est garanti malgré désormais une garantie nette de frais, un rendement réduit à peau de chagrin, voire négatif avec l’inflation avec en sus le grignotage fiscal au fil de l’eau, mais dont la liquidité est assurée à tout moment, a encore guidé près de trois quarts des souscriptions de 2019 vers le fonds euro. L’assurance-vie, nouveau viatique de l’économie réelle et des enjeux sociétaux : un pari à hauts risques ? Repère par Laurent Gayet directeur général adjoint AXAWealth Europe et Olivier Roumélian avocat au barreau de Paris Cabinet ARTESIA © Droits réservés © Droits réservés NDLR : repère publié in Actes Pratiques et Stratégie Patrimoniale n°1, janvier 2020, 1

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