la revue fiscale du patrimoine
ENTREPRISE FAMILIALE 78 une durée déterminée ou déterminable ou supprimé » (C. com., art. L.28-11, al. 2). Il ajoute : « Les actions de préférence sans droit de vote ne peuvent représenter plus de la moitié du capital social, et dans les sociétés dont les actions sont admises aux négociations sur un marché réglementé, plus du quart du capital social » (C. com., art. L.28-11, al. 3). POUR ALLER PLUS LOIN Illustration Une partie des actions de préférence transmises pourraient être initia- lement privées temporairement du droit de vote Note 37 , celui-ci étant activé au fur et à mesure dans le temps . Cette activation du droit de vote pourra être soumise à des critères objectifs d’implication des plus jeunes générations dans la vie sociale. Par exemple, il pourrait être prévu que les actions de préférence attribuées aux héritiers deviendront des actions ordinaires à l’issue d’un délai de 5 ans à compter de la transmission, ce délai étant, le cas échéant, prolongé d’un ou 2 ans, si l’héritier est absent à plus de deux réunions d’associés consécutives. POUR ALLER PLUS LOIN Attention à l’article L. 228-15 du Code de commerce Lors de la conversion des actions en actions de préférence sans droit de vote, nonobstant le fait que les actions ainsi converties voient leurs droits réduits, il y a lieu de faire application des dispositions de l’article L. 228-15 du Code de commerce, impliquant la mise en œuvre de la procédure des avantages particuliers Note 38 , ainsi que la privation du droit de vote, à peine de nullité de la délibération de conversion, et plus géné- ralement la paralysie des actions détenues par le ou les associé(s) dont les actions sont converties (C. com., art. L. 228-15, al. 2) . 76. - Actions de préférence à droit de vote plural (loi Pacte). - La loi Pacte du 22 mai 2019 a réformé en profondeur le régime des actions de pré- férence Note 39 , dans un sens qui avait été préconisé pour la SAS dès 2012 Note 40 , en substituant dans l’article L. 228-11, alinéa 1 er, aux mots « dans le respect des dispositions des articles L. 225-10 », les mots : « et, pour les sociétés dont les actions sont admises aux négociations sur un marché réglementé ou sur un système multilatéral de négociation, dans le respect des articles » L. 225-122 à L. 225-125. Cette réforme est très importante en ce qu’elle a supprimé, purement et simplement, pour les sociétés non cotées et pour l’avenir (à compter du 24 mai 2019 donc, date d’entrée en vigueur de la loi Pacte Note 41 , le renvoi au principe de proportionnalité du droit de vote, dont les actions de préférence non cotées sont donc affranchies. Les actions à droit de vote plural, qu’elles confèrent deux, trois, quatre, cent, mille droits de vote ou davantage, peuvent donc désormais être émises par les sociétés anonymes (SA) et les sociétés en commandite par actions (SCA) non cotées et tout doute est levé quant à leur utilisation au sein des SAS. Est ainsi légalisé le retour à une pratique courante jusque dans les années 1930, dénoncée par une partie de la doctrine qui évoquait à son sujet un « fascisme actionnarial », avant d’être purement et simplement interdite par la loi en 1933. 77. - Fondement. - L’étude d’impact du projet de loi Pacte a justifié la ré- forme en soulignant qu’il résultait du droit alors applicable « une impossibi- lité d’octroyer rapidement des droits politiques forts à certains associés, par exemple aux fondateurs, ce qui prive ces derniers d’un outil qui leur permet d’éviter d’être dilué, notamment dans le modèle des start-ups qui dissocie le rôle des investisseurs de celui des fondateurs. Or les entreprises françaises ont un réel besoin de renforcer leurs fonds propres pour financer leur déve- loppement. Un raisonnement identique peut être tenu s’agissant d’anticiper la transmission ou de fidéliser les salariés » Note 42 . 78. - L’insertion des actions à droit de vote plural émises par les SAS dans le processus d’émission des actions de préférence . - Le paradoxe est que, dès l’institution de cette nouvelle forme sociale par la loi du 3 jan- vier 1994 Note 43 , certaines SAS avaient pris l’habitude d’émettre des actions, la doctrine unanime considérant alors que cette nouvelle forme sociale n’était pas régie par le principe de proportionnalité du droit de vote. Une difficulté insurmontable apparut avec l’ordonnance n° 2004-604 du 24 juin 2004, la- quelle institua les actions de préférence tout en renvoyant pour l’ensemble d’entre elles – en ce comprises celles émises par les SAS – audit principe de proportionnalité. L’étude d’impact résumait ainsi le dilemme posé aux prati- ciens par le droit antérieur à la loi Pacte : « [il existe] une différence injustifiée entre les SA et les SCA, d’une part, et les SAS, d’autre part ; les SAS ne sont pas soumises aux dispositions des articles L. 225-122 à L. 225-125 du Code de commerce, et elles peuvent ainsi émettre des actions de préférence à droit de vote double dès leur émission et même à droit de vote multiple. Une incer- titude subsiste toutefois sur cette faculté : certains auteurs estimaient, à tort selon nos analyses, que les actions émises par une SAS restaient soumises au principe de proportionnalité et au plafonnement des droits de vote dans les assemblées en application de l’article L. 228-11, au regard de la généralité de cet article postérieur à celui introduisant cette faculté dans les SAS » Note 44 . 79. - Portée et pratique. - On l’aura compris, la loi Pacte vient donc lever toute incertitude au sujet de la pratique des actions à droit de vote plural dans les SAS, et plus largement elle saisit l’occasion pour autoriser le procédé dans toutes les sociétés par actions en général, SA et SCA incluses donc, avec pour seule restriction que la société ne soit pas cotée. On retiendra qu’il est ainsi désormais possible, par la technique des actions de préférence, de conférer en toute quiétude aux actions d’une société familiale, soit par création d’actions nouvelles, soit plus probablement par voie de conversion d’actions préexistantes, un nombre multiple de droits de vote, sans autre plafonnement que celui fixé par les statuts. Note 37 Le droit de participer, qui est d'ordre public, étant quant à lui toujours maintenu : C. civ., art. 1844, al. 1er. Note 38 C. com., art. L. 228-15, al. 1er, sous la réserve posée par l'alinéa 3. Note 39 R. Mortier et S. de Vendeuil, Loi PACTE : La réforme des actions de préférence : JCP E 2019, 1320. Note 40 R. Mortier, in Les actions de préférence : Actes prat. ing. 2012, n° 126, dossier 6, n° 43. Note 41 V. L. n° 2019-486, 22 mai 2019, art. 100, II : « Le présent article est applicable aux actions de préférence émises à compter de l'entrée en vigueur de la présente loi ». Note 42 Étude d'impact, Projet de loi relatif à la croissance et la transformation des entreprises, p. 359. Note 43 L. n° 94-1, 3 janv. 1994 : JO 4 janv. 1994, p. 129. Note 44 Étude d'impact, Projet de loi relatif à la croissance et la transformation des entreprises, p. 360
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