Noël 2020 - Spécial beaux livres

9 Trente-six personnalités témoignent de sa pensée JeanLeonetti Ancienministredes Affaireseuropéennes Rapporteurdes loisde bioéthique Simone Veil : incarnation de la Dignité humaine 78651 : ceschiffres inscrits,demanière indélébile, sur lapeaudeSimoneVeilétaientdestinés à nier en elle toute personne humaine et réduire son existence à un simple numéro tatoué sur son bras gauche. La jeune Simone Jacob, âgée de seize ans, déportée à Auschwitz-Birkenau, puis à Bergen-Belsen, portera donc toute sa vie ce signe de négation de la dignité humaine que les nazis avaient voulu inscrire dans sa chair. Ce numéro était censé faire des personnes déportées des « victimes honteuses»,des«animaux tatoués»comme l’avait ressentialorscellequiallaitdevenir l’incarnationde laDignitéhumaine. Iln’avaitpas fallu longtempspourquesaviebasculed’uneexistencepaisiblesur laCôted’Azurdans une familleaimanteà labarbariedescampsde lamort, le«statutdes Juifs»décidéparVichy, le rempla- cementdestroupesd’occupation italiennespar lesAllemandsprécipite le destinde la jeunefillequipassesanstransitionde l’insoucianceà l’horreur. Avait-ellealors luKantensepréparantàsonexamendubaccalauréat et son concept de dignité de la personne humaine qui ne doit jamais être traité comme un moyen, mais comme une fin. C’est peu probable. En revanche, l’intelligencevivede la jeunefilleauraitcertainementaimé s’exercer à débattre de cette conception de la morale universelle. Sans douteaurait-ellenotéavecunecertaine ironieque lephilosophequipar- laitd’universalitén’avaitpasquitté lepetitespacedesaville.Sansdoute dans lecamp,elleauraitmesuré ladistanceentre leconcept imaginépar unphilosopheà lavie tranquilleet la réalitéviolentede survieà laquelle elle était désormais confrontée. Dans sa culture laïque, il est probable qu’onn’avaitpasenseignéàSimoneque ladignitéde touthommevient deDieuqui l’acrééà son image. Danssonouvrage Fondementsde lamétaphysiquedesmœurs ,lephilosophe allemanddéconnecte lui-même lanotiondedignitéde la foi :«Tous les hommes sont dignes de la même dignité car si les choses ont un prix, l’homme, luiaunedignité, laquelleestsansdegré,nipartieetcelaserait vrai même si Dieu n’existait pas ». Mais où est Dieu dans cet enfer des hommesoù lapréoccupationpeutêtred’attendrequesonvoisinmeure pourobtenirunsupplémentderationdepainqui luiétaitdestiné?Mais où est l’humain qui a lui aussi déserté les cœurs et les pensées ? Décidé- Préfacépar Jean et Pierre-FrançoisVeil

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